Arrivés vers la fin du 18e siècle, les colons madawaskayens s'acclimatent peu à peu à leur nouvel environnement. Ces nouveaux habitants se voient alors partager une région fractionnée par le fleuve Saint-Jean. Ils se retrouvent donc culturellement et économiquement unis mais divisés par la politique et le territoire (voir vignette 1), phénomène encore palpable de nos jours.
Des deux côtés du fleuve, à l'époque de la colonisation, les terres sont des plus fertiles et on y pratique soit uniquement l'agriculture en vendant ses surplus, ou encore en conciliant agriculture et foresterie. La plupart des habitants du Madawaska possèdent de petites fermes, quelques animaux, et s'adonnent surtout à la culture du blé, de l'avoine et éventuellement de la pomme de terre.1 Par contre, il existe aussi des fermiers très prospères qui sauront tirer profit des chantiers, non pas pour y travailler, mais pour y écouler leurs surplus.2
Puisque l'agriculture n'est praticable que pendant les mois d'été et d'automne, certains habitants du Madawaska profitent de l'ouverture du marché britannique de la construction navale pour diversifier leur économie. La demande de pin blanc est alors à son apogée et celui-ci sert surtout à la construction de mâts de navires. Les forêts du Madawaska en regorgent, et on voit alors apparaître de nombreux chantiers forestiers des deux côtés du fleuve Saint-Jean. Les habitants s'y rendent alors durant les mois d'hiver (la coupe du bois) et s'adonnent au flottage de billots (la drave) durant les mois de printemps.3
La vallée du Saint-Jean ne pouvait échapper aux investigations des habiles et perspicaces explorateurs forestiers. Mais qu'était-il besoin de perspicacité et d'habileté pour découvrir ce bois de pin si fort et si robuste, qui croissait partout et baignait ses pieds dans les eaux du fleuve ? Il était incontestablement le roi de nos forêts. Le Saint-Jean offrait des conditions exceptionnellement avantageuses pour le flottage des billots, et le marchand de bois trouvait dans la région des jeunes gens habitués à la forêt et qui ne redoutaient ni les froids ni la neige de nos rudes hivers.4